Affaire Huawei: Les dessous de l'histoire d'une guerre technologique

Affaire Huawei: Les dessous de l'histoire d'une guerre technologique
vendredi 24 mai 2019 - 08:17

Le monde est en train de vivre une réelle guerre technologique. La guerre commerciale entre les USA et la Chine vient de faire sa première « victime » de taille, à savoir le géant technologique de l’empire du Milieu, Huawei.

Huawei est l’un des trois noms importants du marché de la téléphonie mobile dans le monde, les deux autres étant Samsung et Apple. Par ailleurs, la compagnie chinoise est une référence dans le domaine des réseaux, et leader de la technologie 5G actuellement dans le monde.

La compagnie s’est imposée en tant que n°2 mondial pour les ventes de smartphones dans le monde en 2018, en totalisant un chiffre d’affaires de 109 milliards de dollars, dépassant de loin la marque à la pomme, et se rapprochant du Sud-Coréen au passage, qu’elle devait dépasser en 2020, selon les prévisions des experts de la téléphonie mobile.

Le ban dont fait l’objet la compagnie de l’empire du Milieu n’est pas juste un hasard, puisqu’il est au centre du « débat » qui oppose les deux puissances économiques depuis des mois déjà. De plus, ce qui dérange « vraiment » les États-Unis dans l’affaire Huawei est le fait que la compagnie est accusée d’utiliser ses équipements pour espionner les sociétés américaines qui disposent de ses solutions. Cela va même toucher la sécurité nationale du pays, selon les déclarations de l’actuel président des USA. Donald Trump a signé un décret qui place Huawei dans la liste noire des compagnies représentant un risque à la sécurité des USA.

Suite au 16 mai, les compagnies américaines ont été sommées de ne plus traiter avec le géant chinois de n’importe quelle façon. Le coup de grâce est survenu après l’interdiction du chinois d’accéder aux services de Google, notamment le système d’exploitation Android et l’ensemble de son univers.

Ainsi, Huawei ne pourra plus profiter des applications importantes du géant informatique, et devra se contenter de quelques mises à jour pour les terminaux qui existent sur le marché actuellement, sans pouvoir profiter du reste du PlayStore.

Au-delà du blocus de sa licence Android par Google, Huawei ne pourra plus faire appel aux logiciels et matériels développés par des compagnies américaines, notamment le cas d’Intel et Microsoft, pour ses produits. La compagnie qui disposait d’un potentiel de croissance important a été donc mise hors de la course technologique de manière assez « dure » suite à la guerre commerciale entre les USA et la Chine.

Quel avenir pour Huawei ?

À la lumière du ban dont fait l’objet la compagnie chinoise, au niveau software tout aussi bien que hardware, une longue question se pose : qu’en est-il de l’avenir des anciens, actuels et futurs équipements de Huawei ?

Trump a, dans un acte de « générosité », décidé d’octroyer 90 jours à la compagnie chinoise, et sa sous-marque Honor, afin d’offrir la possibilité aux terminaux existants d’avoir accès à des mises à jour, mais aussi pour permettre à la compagnie de faire le ménage pour ses terminaux.

Cette « chance » a d’ailleurs été confirmée par Google via le compte officiel d’Android sur Twitter, à travers lequel la compagnie américaine a indiqué que les terminaux Huawei actuels continueront de recevoir des mises à jour via le PlayStore, mais que cela se fera de façon limitée, et ce, en accord avec la nouvelle réglementation.

Ainsi, dépassé le 19 août, et dans le cas où les choses ne s’arrangent pas ente les deux puissances économiques, les terminaux Huawei cesseront, probablement, de recevoir des mises à jour, non pas seulement aux USA, mais dans l’ensemble du monde. Concrètement, à la fin des 90 jours, la version d’Android dont disposent les terminaux de la compagnie chinoise restera la même durant toute leur durée de vie, sauf si une solution est trouvée « miraculeusement », ce qui est peu probable actuellement.

Huawei peut-il survivre sans les compagnies US ?

L’avenir semble très sombre pour Huawei, notamment pour ses futurs terminaux. La compagnie ne va quand même pas arrêter la machine du progrès technologique à cause du ban. Mais, est-ce que la compagnie dispose du potentiel pour poursuivre et développer son activité sans avoir recours aux technologies américaines ?

Il faut savoir qu’en 2018, Huawei a dépensé un budget de 70 milliards de dollars dans l’acquisition de différents composants matériels, dont 11 milliards en provenance de compagnies américaines telles Intel, Qualcomm, Micron Technology, etc. Cela concerne principalement des processeurs, les protections d’écran Gorilla Glass, des antennes de communication, des mémoires de stockage, etc. Cela place la compagnie parmi les principaux clients desdites compagnies américaines opérant dans le secteur technologique, mais cela ne semble pas suffisant pour autant pour ne pas lui imposer un blocus par les USA.

Huawei pourrait très bien se fournir ailleurs pour ces composants, mais la compagnie chinoise souhaite bien poursuivre ses échanges avec les fabricants américains, chose qui est compliquée actuellement. Toutefois, il faut savoir que la compagnie dispose effectivement du potentiel pour développer certaines parties de ses équipements, le cas des puces Kirin, qui remplacent les puces Silicon de Qualcomm sur certains terminaux haut de gamme de Huawei, notamment les séries Mate et P.

Huawei disposerait actuellement d’un stock de 3 mois des pièces auxquelles la compagnie n’aura plus accès à partir du 19 août prochain. Mais même en remplaçant ces éléments matériels par d’autres alternatives, le vrai problème qui se pose est celui du système d’exploitation. Comment peut-on concevoir un terminal actuellement sans Android ?

Huawei est en train de développer son propre OS

Déjà, il faut savoir que l’OS de Google est disponible en open source, ce qui veut dire que son code source peut-être modifié selon le besoin de chaque constructeur. Cela est d’ailleurs visible à travers les surcouches que les constructeurs rajoutent pour personnaliser leurs équipements par rapport à la concurrence, on citera dans ce sens l’exemple de l’EMUI de Huawei et le ColorOS de l’autre chinois, Oppo.

Cela voudrait dire que Huawei peut très bien utiliser cette version « basique » d’Android pour ses terminaux, mais les choses ne sont pas aussi simples à ce niveau. En effet, la version open source d’Android n’offre pas les mêmes services que l’OS qui équipe la majorité des smartphones dans le monde, notamment Search, Gmail, YouTube, Maps, etc., ce qui n’est donc pas intéressant pour la marque.

Cela dit, il semble que Huawei est en train de développer son propre OS, depuis 2012 exactement, et que le constructeur serait prêt à le déployer, selon les déclarations de Richard Yu, PDG de Huawei, qui avait avancé lors d’une interview accordée au média allemand Die Welt, «nous avons développé notre propre OS, afin de faire face à une éventuelle interdiction d’accès aux différents systèmes d’exploitation sur nos équipements».

Huawei n’est d’ailleurs pas le seul constructeur à s’être lancé dans ce chantier, puisque même l’actuel n°1 mondial, Samsung, est en train de développer son propre système d’exploitation. Cela est donc poussé par le fait que les constructeurs dépendent grandement de l’OS de Google, chose qui est négative dans la mesure où ils pourraient se voir retirer leurs licences d’exploitation Android à tout moment.

Huawei ne pourra plus faire affaire avec d’autres compagnies pour ses équipements

Cela dit, passer à un autre OS s’avère être un vrai challenge, surtout pour les utilisateurs qui se sont familiarisés au fil des années à utiliser un certain système d’exploitation, et qui doivent, du jour au lendemain, passer à autre chose.

L’autre point négatif est le fait qu’avec ce ban, il faudra développer un magasin d’applications et sceller des partenariats intéressants, puisque dans le cas de Huawei, les utilisateurs n’auront plus accès à certaines plateformes très prisées, notamment Instagram, Facebook, Snapchat, Netflix, YouTube, etc.

Cela dit, il est vrai que la Chine n’utilise pas Google, privilégiant des solutions locales comme Baidu, mais celles-ci n’offrent en rien la même expérience que le PlayStore de Google. Cela est d’ailleurs le même cas pour le magasin d’applications d’Amazon, dont le catalogue et le service sont loin derrière la plateforme de Google.

Au-delà des smartphones, Huawei ne pourra plus faire affaire avec d’autres compagnies pour ses équipements, notamment Microsoft et Nvidia pour ses ordinateurs portables. Ces terminaux devraient donc se limiter à des fonctions très basiques, ce qui ne risque pas d’intéresser grand monde.

De plus, avec Huawei hors de la course, même le déploiement de la 5G devrait prendre du retard, plus exactement 2 ans, pour passer à la vitesse supérieure de la connectivité dans le monde.

Les autres fabricants du domaine disposent certes des capacités techniques pour offrir des solutions dans ce sens, mais Huawei reste la référence du marché des réseaux télécoms dans le monde.

Le scénario de revanche vis-à-vis d’Apple en Chine

Toutefois, il faut savoir que le ban n’impacte pas seulement Huawei, mais les consommateurs aussi. Avec la compagnie chinoise à l’écart, on se retrouve avec un marché limité, puisque la concurrence ne se fera plus qu’entre Samsung et Apple, du fait que les autres compagnies chinoises et d’autres origines n’offrent pas le même potentiel technologique. Le marché devrait donc être contrôlé par certaines marques, ce qui devrait logiquement résulter dans un déséquilibre de l’offre et la demande.

Le blocus imposé à Huawei devrait par ailleurs baisser la barre de l’innovation technologique, pour citer le cas des smartphones à écran pliable, la compagnie chinoise fut l’une des pionnières dans ce domaine. On se retrouvera donc dans un marché où l’innovation se fera petit à petit, mais surtout sans alternatives, ainsi que des produits qui n’innovent pas grandement, car il n’y a pas de « réelle » concurrence.

Que ce soit Huawei ou une autre compagnie chinoise, il faut savoir que la guerre commerciale entre les USA et la Chine devrait s’étendre à d’autres compagnies de l’empire du Milieu, mais que celui-ci devrait s’attaquer à des compagnies américaines aussi.

En effet, on est déjà en train de parler d’un scénario de revanche vis-à-vis d’Apple en Chine. Les deux puissances économiques devraient donc trouver des solutions concrètes qui ne nuiraient à aucune des parties prenantes, au lieu de déstabiliser le marché dans des scénarios à la « Don Quichotte ».

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