Les Algériens sont retournés dans les rues pour leur habituel vendredi de manifestations. Comme ils l’avaient promis la semaine dernière, leur mobilisation ne sera pas interrompue tant que leurs revendications n’auront pas trouvé d’écho chez le pouvoir.
Les manifestations reprennent de plus belle en ce vendredi 10 mai, le premier que les Algériens passent pendant Ramadan. Ni la faim ni la soif ne les aura arrêté dans leur élan démocratique.
A Alger, Bouira, Batna, Saida ou encore à Médéa, partout en Algérie, les manifestants sont sortis en grand nombre accomplir leur devoir civil, en faisant part de leur rejet complet de la stratégie du pouvoir de ligoter l’opposition et de continuer vers l’élection présidentielle du 4 juillet.
« Djoumhouria machi caserna « (L’Algérie est une république pas une caserne) ont scandé les manifestants à Tlemcen dénonçant les agissements du général, chef d’état major, tandis que dans d’autres villes, d’autres slogans hostiles à Gaid Salah ont été entendus.
Cette semaine, leur mobilisation est encore plus significative puisque la veille, Louisa Hanoune, la chef de file du Parti des Travailleurs, le PT (parti de l’opposition fondé dans les années 90 lors de l’ouverture vers le multipartisme), a été arrêtée alors qu’elle devait être entendue en tant que témoin seulement.
Le pouvoir règle ses comptes
Louisa Hanoune, figure emblématique de l’opposition algérienne, une opposition réduite presque à néant durant les vingt ans de présidence d’Abdelaziz Bouteflika, devait être « convoquée comme témoin en lien avec les responsables arrêtés ces derniers jours » (Said Bouteflika et les généraux Tartag et Toufik), « et elle se retrouve à son tour arrêtée », a déclaré Ramdane Youssef Tazibtn membre du bureau politique du PT.
Voyant la récupération flagrante du pouvoir militaire, qui a commencé à régler ses comptes avec plusieurs personnalités sans pour autant répondre aux exigences du peuple, les manifestants ont commencé à appeler de façon directe à l’instauration d’un pouvoir civil et non pas militaire.
Les Algériens ont donc appelé ce vendredi, au boycott des élections de juillet, en exigeant le départ du système, représenté par Abdelkader Bensalah et Noureddine Bédoui, entre autres.
Ces derniers jours, la chasse aux sorcières a atteint son paroxysme. Les médias étatiques subissent de plein fouet la censure de la part du pouvoir, ce vendredi, l’ENTV, la télévision nationale n’a pas couvert les manifestations.
Cette semaine également, Abderrezak Siah, le journaliste présentateur du JT de 17h à 20 sur la chaîne publique A3 « a été écarté du journal par la direction de A3 », à cause de sa position pour le Hirak, a indiqué Abdelmadjid Benkaci, journaliste de Canal Algérie.
Dans une interview accordée à Berbère télévision, en marge d’un sit-in hebdomadaire des journalistes télé le 29 avril, le journaliste avait dénoncé la pression exercée par l’Etat pour censurer la presse. « La télévision publique n’était pas le porte-parole de l’État mais le porte-parole de la corruption », avait déclaré le journaliste. « Notre principale mission consiste à assurer le service public. J’appelle tous les journalistes de la télévision et les jeunes du Hirak à soutenir pacifiquement notre combat », a-t-il ajouté.