Sécheresses, désertifications, inondations… le changement climatique est en cours et de nombreux territoires en subissent déjà les conséquences. Les impacts seront croissants et complexes car ils interagissent avec d’autres facteurs de stress sociaux, économiques et environnementaux.
Face à ces bouleversements, l’adaptation des territoires est un enjeu majeur. Ces derniers subiront les conséquences du changement climatique de différentes manières en fonction de leur emplacement géographique, poussant de nombreux secteurs d’activité à s’adapter : agriculture, tourisme, industrie, bâtiments et infrastructures.
Dans ce sens, l’initiative citoyenne OTED a organisé, ce jeudi 14 avril, un webinaire qui a abordé les questions sur le modèle de résilience territoriale, auquel ont pris part de nombreux experts venus discuter du sujet, dont Quentin Ballin, Responsable d’équipe projet, division agriculture, développement rural et biodiversité, agence française de développement, Mouna Mseffer, journaliste et co-auteur de « Maroc : justice climatique, urgences sociales », Docteur Ibrahim Hafidi, directeur général de l’agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (ANDZOA), Faissal sehbaoui, directeur général d’AgriEdge, Ahmed Baroudi, directeur général de la société d’investissements énergétiques et Nadia Lamili, chargée de mission à OCP Group.
« Chaque territoire est donc appelé à construire sa résilience. La résilience désigne la capacité d’une organisation, d’un groupe ou d’une structure à s’adapter à un environnement changeant. Il s’agit de continuer à vivre avec ces nouvelles conditions climatiques en prenant des décisions et des actions tant au niveau des politiques publiques que des secteurs privés et des tiers lieux. Lesquelles solutions nécessitent l’élaboration de schémas d’ingénierie propres à chaque territoire car il y a rarement une solution unique, mais une composition, une réorganisation et des réponses locales faisant appel à l’innovation », a expliqué Nadia Lamili, chargée de mission à l’OCP.
Selon le Dr Ibrahim Hafidi, chaque territoire est appelé à établir un diagnostic de vulnérabilité qui lui permettra d’identifier les risques liés au changement climatique et de repérer les changements à opérer. Selon les experts, le risque climatique résulte du croisement entre l’aléa climatique (augmentation des températures, les inondations, la multiplication des événements extrêmes, etc.), de l’exposition des populations et de la vulnérabilité du territoire.
Concernant les zones oasiennes, le Dr Hafidi a tenu à rappeler que le volume des investissements publics dans les zones oasiennes et de l’arganier s’est élevé à 105 milliards de dirhams, dépassant le montant prévu par la stratégie de développement (2012-2020) qui est de 92 milliards de dirhams.La même source souligne que cette stratégie a permis d’améliorer tous les indicateurs socioéconomiques dans les régions cibles.
Il a souligné, à cet égard, que les programmes de la stratégie ont contribué au désenclavement de ces espaces géographiques qui représentent 35% de la superficie du Maroc et qu’occupe 15% de la population totale du Royaume, ainsi qu’à l’amélioration du taux de scolarité qui a atteint les 100%, et du taux d’accès à l’eau potable et aux services de santé.
Pour sa part, Faissal Sehbaoui, directeur général d’AgriEdge, s’est penché sur le phénomène de la sécheresse notamment dans le secteur agricole, affirmant que la gestion rationnelle de la ressource eau s’impose plus que jamais.
« Les nouvelles technologies qui associent le digital et l’intelligence artificielle méritent une attention particulière. », a fait savoir Faissal Sehbaoui.
« Plusieurs solutions digitales mises au point par des startups permettent de rationaliser l’eau d’irrigation de manière à apporter la bonne quantité au bon moment et d’éviter ainsi les gaspillages très courants dans les autres pratiques d’irrigation. «Des politiques d’incitation à l’utilisation des solutions digitales de pilotage de l’irrigation sont plus que nécessaires » estime-t-il.
En effet, l’adaptation aux changements climatiques implique en effet une connaissance fine de l’ampleur des changements, de leur nature, de leurs impacts, des territoires et du rôle des acteurs institutionnels, économiques, usagers, société civile, ONG…
Dans ce sens, le Plan Climat National (PCN) 2030, réalisé par le Ministère de l’Energie, des Mines et de l’Environnement, prévoit la mise en place de Plans Climats Régionaux (PCR) adaptés à la politique de Régionalisation. En 2020, des études pour l’élaboration de 7 Plans Climats Régionaux ont été lancées au profit des régions de Beni Mellal Khenifra, Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Casablanca-Settat, Draa-Tafilalet, l’oriental, Guelmim-Oued Noun et Laayoune-SakiaEL Hamra. Mais cette vision n’est pas encore suffisamment prise en compte dans les politiques locales.
Le Plan National Climat 2030 appelle, en priorité, à assurer l’adaptation des secteurs et ressources clés au changement climatique. « Les efforts d’adaptation au changement climatique se concentreront sur les ressources en eau, le secteur agricole, les ressources halieutiques, les écosystèmes sensibles, la biodiversité ainsi que la santé et le bien-être des citoyens », est-il indiqué dans ce rapport.
Au niveau des efforts d’atténuation, bien que le Maroc soit un pays faible en émissions carbone, une stratégie nationale Bas carbone à l’Horizon 2050 a été réalisée en 2021 et prévoit un rôle central des plans climats territoriaux. « Du fait de leurs proximité des citoyens, les Régions et les villes favorisent le décloisonnement des logiques institutionnelles, la sensibilisation et la mobilisation des acteurs privés et des citoyens, la prise en compte de façon appropriée des aspirations des populations et des spécificités locales et des vulnérabilités climatiques intrinsèques, ainsi que la participation des citoyens, des jeunes et des femmes dans le processus de prise de décision et l’obtention de consensus », lit-on dans ce rapport.
Rappelons que le Maroc est engagé dans la voie Bas Carbone à travers les Contributions Déterminées au Niveau National (CDN) qui sont au cœur de l’Accord de Paris et qui incarnent les efforts déployés par chaque pays pour réduire ses émissions nationales et s’adapter aux effets du changement climatique.
A ce niveau, la NDC Maroc qui vise à réduire de 42% les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, a été considérée en phase avec la trajectoire de réduction du réchauffement climatique de la planète de 1,5°C.