Après avoir brûlé le joker de l’UE, un peu précipitamment, au demeurant, Madrid tente la médiation américaine pour passer outre le conflit qui l’oppose actuellement à Rabat. En effet, la crise n’a de cesse de perdurer et prend chaque jour un nouveau tournant. Le Maroc bien droit dans ses bottes prend tout son temps avant toute nouvelle décision ou déclaration, tandis que les dirigeants espagnols font preuve d’une certaine fébrilité et ne savent plus sur quel pied danser pour éteindre l’incendie qu’ils ont allumé sur la question du Sahara marocain.
Passant souvent par des attitudes conciliantes allant dans le sens d’un rétablissement de relations normales avec le Maroc, on voit ces derniers, quelques jours après, durcir leur langage et faire des sorties souvent agressives, lesquelles, au lieu d’apaiser la situation, ne font que l’aggraver.
La ministre espagnole des Affaires étrangères avait affirmé au cours du week-end dernier que l’exécutif espagnol était disposé à examiner toute solution proposée par le Maroc pour le règlement de la question du Sahara et a même botté en touche quant à la proposition du plan d’autonomie. Pour autant, la ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha Laya, aurait discuté avec son homologue américain, Anthony Blinken, sur la question du Sahara marocain, et du mécanisme de l’ONU pour résoudre le conflit.
A cet égard, Arancha Laya a déclaré : « qu’en accord avec les Etats-Unis elle s’en remettait aux Nations Unies pour la résolution du conflit et que son internationalisation devait être revisitée, toujours dans le plus grand respect pour le Maroc ».
Avec la bonne dame telle qu’elle s’est fait connaître auprès des Marocains, et même d’une double lecture que l’on aurait voulu des plus conciliantes, ces déclarations ne vont que dans un seul sens, la méfiance la plus totale.
De plus pourquoi s’en remettre aux Etats-Unis pour résoudre la crise entre Madrid et Rabat. DA ce qu’on sache, l’Espagne est à 14 km du Maroc, pourquoi alors traverser l’océan pour aller chercher solution à un problème dont elle est responsable, d’autant plus que les Etats-Unis ne tiennent pas à s’immiscer dans la crise entre les deux royaumes. L’Espagne a-t-elle peur de regarder son interlocuteur en face et dans les yeux ? Sur l’autre rive, sud celle-là, on ne peut comprendre cette attitude même avec la plus grande des commisérations.
Madrid essaie d’entraîner Washington dans sa crise diplomatique avec Rabat en faisant valoir que l’une des causes du conflit est le flux de migrants, sachant en cela que les Etats-Unis sont très sensibles à la question de l’immigration irrégulière. Laya misant pour ce faire sur la visite au Portugal et en Espagne, en cours de semaine d’Alejandro Mayorkas, choisi par Joe Biden pour diriger le ministère de la Sécurité intérieure (DHS). C’est un secret de Polichinelle Mayorkas est un immigré cubain qui dès son entrée en service avait annoncé son intention de revenir sur la politique anti-immigrants de Donald Trump.
Quant au secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken, il sera en tournée en France, en Allemagne et en Italie. Mayorkas devrait rencontrer à Madrid son homologue espagnol Fernando Grande Marlaska et d’autres responsables gouvernementaux, afin de « réaffirmer l’importance des relations bilatérales et d’approfondir le travail sur les priorités communes ». Cette visite intervient après le bref salut entre Joe Biden et Pedro Sanchez dans les couloirs du siège de l’OTAN à Bruxelles.
Des sources espagnoles ont indiqué que « Washington a informé que Mayorkas traitera avec son homologue espagnol les menaces communes à la sécurité, y compris l’extrémisme violent et la cybercriminalité, ainsi que les problèmes de migration et de mobilité », soulignant que « l’un des problèmes les plus importants qui doit être abordé dans la réunion est la relation avec le Maroc et les règles militaires et douanières ».
Pour ce qui est la migration la position de Maroc est beaucoup plus claire et précise. Pour Rabat l’accès de quelques immigrés à Sebta ou l’entrée clandestine de Brahim Ghali en Espagne, ne constituent que l’arbre qui cache la forêt. Le véritable problème qui paralyse la normalisation des relations entre le Maroc et l’Espagne n’est autre que la question du Sahara occidental que le Maroc considère comme étant une partie intégrante de son territoire. A ce titre l’Espagne en fait un peu plus que la plupart des pays de l’Union Européenne qui se remettent aux résolutions du Conseil de Sécurité. Le Maroc n’a jamais été contre cette position, laquelle est au demeurant pas propre qu’à l’UE mais à un certain nombre de pays à travers le monde.
Mais ce que le Royaume n’admet pas c’est le fait que l’Espagne, adopte un double jeu et entretient des relations équivoques et hostiles à ses intérêts avec le polisario et l’Algérie et que Madrid puisse intervenir auprès des Etats-Unis pour l’annulation de la reconnaissance de la marocanité du Sahara décidée par le président américain sortant. Au Maroc on ne peut qu’être que consterné devant tels agissements pour le moins inacceptables. Pour cela, Rabat fait savoir qu’elle n’est pas obligée, de faire le gendarme de l’Europe pour la lutte contre l’immigration clandestine. Le Maroc a en outre décidé de cesser toute collaboration en matière de sécurité avec l’Espagne.
Par ailleurs, il a choisi d’autres voies et d’autres pays pour le retour pendant l’été, des ses RME, ce qui va occasionner pour l’Espagne, une belle perte. De plus, le Maroc pense même à résilier à l’avenir l’accord de pêche signé avec l’UE et qui profite pour plus 70 % à l’Espagne, sachant en cela que des milliers d’ouvriers espagnols travaillent dans ce secteur.
Nasser Bourita l’a si bien dit : « Le Maroc d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier et désormais, tout pays qui s’affiche contre notre intégrité territoriale, est considéré comme étant ennemi et nous devons agir en conséquence ».
Cela est valable en particulier pour les alliés traditionnels du Maroc. Il est en effet, inconcevable que Rabat continue à avoir des relations normales avec un pays voisin qui complote et entretient des intelligences avec ses ennemis.