Le Maroc vient de perdre l’un de ses plus grands fils en la personne de Noureddine Saïl, 73 ans, emporté en cela par ce mal du coronavirus (Covid-19), qui n’en finit pas de faire mal. Il incarnait à lui seul, toutes les valeurs de la scène culturelle marocaine.
Scénariste, écrivain-romancier, il était également producteur de cinéma sa passion, en bon cinéphile qu’il était (il est le fondateur en 1973 de la Fédération nationale des ciné-clubs du Maroc dont il a été le Président pendant dix années), imprégné, en cela de la pensée «critique» et des principes de l’école «de Francfort» qui font du septième art une industrie «culturelle» non mercantile.
Proche du cinéma africain il a été le fondateur du Festival du cinéma africain de Khouribga, devenu depuis, rendez-vous continental et international incontournable.
Noureddine Saïl fut directeur des programmes de la Télévision Marocaine (TVM) dans les années 1980 avant de se diriger vers « Canal+Horizons » dès le début de la décennie d’après, pour y boucler le XXème siècle. Les destinées de 2M, dans les débuts du suivant, un peu plus de trois ans durant, furent siennes. Il quitta ensuite la « seconde chaîne » pour occuper le poste de directeur du Centre cinématographique marocain (CCM).
Par la suite, il a été nommé membre de la commission permanente de l’éducation-formation pour tous et de l’accessibilité. Mais avant tout cela, il a été enseignant et Inspecteur Général de philosophie jusqu’à 1984, un concept du savoir rationnel et de questionnement sur la nature de l’homme et de sa signification qui l’aura guidé jusqu’au bout de son chemin de vie et dont il ne s’est jamais départagé.
Scénariste et producteur, il a signé dans des films de Mohamed Abderrahman Tazi, le grand voyage (1981), Badis (1988) et Lalla Hobbi (1996), auteur, il a écrit un roman l’ombre du chroniqueur (1989), où il a fait abstraction à la lette A. Il a marqué le monde du cinéma africain après avoir créé le Festival du cinéma africain de Khouribga, qui est devenu au fil des ans un rendez-vous incontournable des cinéphiles venus d’Afrique et d’ailleurs. Mais sa traversée de vie est si riche qu’il est impossible de toute la retracer, ici.
Dans sa dernière sortie médiatique il y a de cela juste un mois, émouvante au demeurant, on retiendra de Noureddine Saïl, invité de l’Info en Face (Rachid Hallaouy), des propos lourds de sens à propos du coronavirus, « il faut prendre conscience que le fait est là, essayer de s’adapter sans toutefois renoncer à ce qui constitue «le sel de la vie» : vivre, développer, produire, consommer. « Autrement» est le terme qu’il faut retenir. Pour résumer, vivre autrement », ou bien encore « Ce virus est tout ce qu’il y a de négatif pour la création et le développement d’activités culturelles. Ce n’est même pas la peine non plus de parler d’autres activités sinistrées comme le tourisme ».
Son épouse Nadia Larguet, journaliste et ex présentatrice télé aura eu les mots justes pour cet homme qui aura marqué tant de générations marocaines et d’ailleurs. « Noureddine Saïl, c’était la simplicité, le courage et l’intégrité. Cet homme en avance sur son temps était exceptionnellement brillant. Travailleur infatigable il marquera son pays à jamais ». Hespress s’associe à la douleur de ses proches et partage leur peine. Puisse Dieu l’avoir en sa sainte miséricorde.
Photos Mounir Mehimdate