Crise économique, licenciements...Omar Kettani prône une politique d'austérité et de rationalisation

Crise économique, licenciements...Omar Kettani prône une politique d'austérité et de rationalisation
lundi 29 juin 2020 - 08:33

Avec la reprise progressive et « timide » de l’activité économique au Maroc, après l’allègement des mesures de confinement, plusieurs entreprises reviennent sur le marché. Toutefois, la crise économique liée à la pandémie est passée par là, et plusieurs structures ont dû remercier une partie de leurs effectifs afin de sauver leur business. Un licenciement économique, « légitime« , vu la conjoncture difficile que vit l’économie marocaine et mondiale. Une augmentation du chômage au niveau mondial à hauteur de 5 millions la première année de crise, est d’ailleurs attendue.

Pour Omar Kettani, professeur d’économie à l’Université Mohammed V de Rabat, le licenciement économique opéré par les entreprises, et malgré le fait qu’il engendrera une précarité certaine dans plusieurs ménages, « est un mal nécessaire« , soulignant que « le licenciement en lui-même est un acte très dur à assumer parce que licencier veut dire libérer d’un poste de travail, d’un engagement, d’un revenu mensuel ».

« Là, il s’agit d’un licenciement économique. C’est-à-dire on va sauver l’entreprise en sacrifiant une partie du personnel. Sur le plan macro-économique, c’est acceptable, mais sur le plan micro-économique à l’échelle des individus, c’est toujours une décision très difficile. Maintenant, la question qui se pose, c’est quelle alternative pour les personnes qui seront licenciées dans une conjoncture de crise économique ?« , s’interroge l’économiste.

La solution selon Omar Kettani se trouve dans ces mots: « la politique d’austérité« , aujourd’hui une nécessité.

En effet, dit-il, « désormais, comme le coût du licenciement est très important, il faut absolument que le secteur public puisse mener une politique et d’austérité et de rationalité des dépenses publiques et de lutte contre la rente. Parce qu’il faut justifier, maintenant que certains vont souffrir, il faut répartir la souffrance sur les autres. Pour qu’elle soit acceptable ».

« Il ne faut pas que l’Etat puisse mener le même confort de vie qu’il menait auparavant. Voilà comment on pourrait aider au maximum les gens licenciés. Il faut vraiment qu’il y ait une politique d’austérité, il ne faut pas que le confort reste du côté de l’Etat et des hauts fonctionnaires de l’Etat, pour que les simples citoyens ressentent que même les fonctionnaires ont souffert de cette crise. Pour faire accepter la chose », estime l’économiste.

Pour ce qui est mesures à engager pour justement éviter un « licenciement massif », l’universitaire rappelle d’abord le coût de la relance économique estimé par la CGEM à 80/ 100 milliards de DH, une estimation, dit-il, qui ne doit pas être prise à la légère « puisque même le gouvernement a attendu le rapport de la CGEM pour prendre les mesures nécessaires pour la relance économique ».

Il explique: « les 80 milliards de DH ont été dispatchés. 10 milliards pour les entreprises publiques, et 70 pour les entreprises privées, et cette estimation montre que le coût de la relance économique est à peu près égal au coût du confinement« .

Toutefois, relève-t-il, les « 80 milliards, il faut les trouver! Au début du confinement, on a pu rassembler la même somme à travers l’aide du FMI, la mobilisation du gouvernement et du secteur privé. Aujourd’hui, il va falloir faire la même chose ».

Et là, notre interlocuteur est catégorique, la solution, c’est austérité. « Nous savons que le PIB marocain dégage une marge de valeur ajoutée, chaque année, autour de 30 milliards de dirhams. Donc il faut au moins 3 ans pour amortir le deuxième choc des 80 milliards. Cela veut dire, et on va retourner à l’idée principale, qu’il faut adopter une politique d’austérité très sévère et que l’Etat souffre un peu et pas uniquement les entreprises et les ménages« , soutient-il.

Et de rappeler que « la politique d’austérité a été citée par le chef du gouvernement, Saad Eddine El Otmani, et puis on en a plus parlé après. Dans une société, lorsqu’il y a une souffrance, il faut qu’elle soit partagée. Si elle ne l’est pas, et bien elle n’est pas acceptable« .

Pour l’économiste, beaucoup de citoyens vont devoir faire des sacrifices, mais doivent en même temps sentir que les autres en font aussi. « Une personne licenciée pour sauver l’entreprise doit voir que l’Etat fait son maximum pour aider ces entreprises pour ne pas sacrifier le tiers. Et que le sacrifice ne touche que 10% du personnel. C’est vrai qu’il y a des raisons objectives derrière, mais il faut faire des efforts et des sacrifices » dit-il.

S’agissant toujours de la politique d’austérité, Kettani estime qu’il n’est pas « évident d’économiser de l’argent si l’on poursuit le gaspillage qui était fait avant dans les marchés publics. Si on compte les projets publics, comment ils étaient majorés, ou encore la corruption. C’est énorme« , lance-t-il.

À la limite, souligne Kettani, les 80 milliards peuvent être rassemblés par trois « mesures-politiques », à savoir la rationalisation des dépenses publiques, la lutte contre la rente, et l’austérité. Ce sont là trois éléments complémentaires, et « chacune va jouer son rôle pour économiser plusieurs milliards de centimes. Et cela va sauver les entreprises et de ce fait les emplois« .

Cependant, l’économiste estime qu’on est confronté à « un système qui est difficile à ébranler« . La Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD), présidée par Chakib Benmoussa compte proposer une rupture par rapport à l’économie de la rente, « ils vont peut-être oser un peu. Mais entre la proposition et la pratique, c’est tout un travail à faire. On verra », conclut Omar Kettani.

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