Ilias Tahiri, une autre victime du racisme oubliée

Ilias Tahiri, une autre victime du racisme oubliée
vendredi 12 juin 2020 - 17:29

Alors que la planète est toujours secouée suite à la mort brutale de George Floyd, une autre victime du racisme, marocaine cette fois-ci, réapparaît à la surface. L’affaire étouffée date de presque déjà un an, mais la récente circulation d’une vidéo montrant le jeune homme se faire étrangler sur un lit par plusieurs agents de sécurité dans un centre pour mineurs, remet le dossier d’actualité.

C’est un 1er juillet 2019 dans un centre pour mineurs – placé sous tutelle de la province d’Almería, en Andalousie- qu’Ilias Tahiri trouva la mort à seulement 18 ans. La vidéo « bestiale » divulguée par El Pais montre des images, non publiées, dévoilant les circonstances de la mort du jeune marocain des mains de non pas un mais six individus l’asphyxiant à tour de rôle.

Le quotidien espagnol indique qu’il s’agit d’«un responsable du centre et cinq gardes de sécurité », et la vidéo dévoile l’un d’eux en train de vérifier le pouls du garçon à maintes reprises, tout en continuant à le violenter, même s’il semble n’en trouver aucun.

La séquence choquante de 13 minutes se termine par une image des responsables du meurtre laissant seul un Ilias Tahiri ayant déjà rendu l’âme alors qu’un médecin essaye en vain de le ramener à la vie.

Comment est-ce qu’Ilias Tahiri est arrivé jusque-là ?

Originaire de Tétouan et résident à Algasiras, Ilias Tahiri est passé par deux centres pour mineurs avant d’atterrir dans celui d’Oria, le 2 mai 2019. Ce dernier, selon El Pais, décrit le garçon comme problématique et rapporte qu’il fut diagnostiqué et traité pour « trouble de la personnalité antisociale sévère », suite aux violences et intimidations infligées par son environnement familial. Il quitta finalement le centre dans un sac mortuaire, deux mois plus tard.

Qu’en est-il de la justice ?

La juge Teresa Ines Sanchez Gisbert a décidé, en janvier 2020, qu’il s’agit d’une « mort violente accidentelle » et que le garçon avait violemment résisté aux efforts des gardes pour le retenir, alors que la vidéo ne montre aucun signe de résistance de la part de Tahiri.

Cette décision a indigné la famille du jeune homme, en particulier sa mère qui a déclaré que son fils avait été maltraité dans le centre, ce qui la poussa à interjeter appel.

L’un des gardes impliqués, José Lorente Lopez, a déclaré aux enquêteurs que son rôle lors de l’immobilisation était de veiller à ce que la tête du jeune marocain « reste sur le côté pour éviter la suffocation, les vomissements et permettre au jeune homme de respirer ». Pourtant la vidéo montre que Lopez n’est pas intervenu lorsque Tahiri était face à l’oreiller et lorsqu’un garde a mis son genou près de la tête du garçon pendant plusieurs minutes.

Le protocole de l’association pour la gestion de l’intégration sociale GINSO, contrôlant le centre d’Oria, stipule que les mineurs doivent être immobilisés face visible à moins que les professionnels de la santé ne recommandent qu’une personne soit retenue face cachée. Néanmoins, El Pais précise qu’aucun rapport médical d’Ilias Tahiri ne recommandait qu’il soit retenu face cachée s’il venait à être immobilisé.

Le rapport d’autopsie du garçon a exclu la suffocation comme cause de décès et a plutôt opté pour une « arythmie cardiaque», même s’il évoque également des signes clairs de suffocation.
Des ONG espagnoles de défense des droits de l’homme ont d’ailleurs vainement condamné cet incident, et le médecin légiste a insisté sur le fait que « la même chose s’est produite dans de nombreux cas. »

Ilias Tahiri, le George Floyd marocain

Le frère d’Ilias, Mounaim, a affirmé pour sa part que la vidéo montre des similitudes manifestes avec l’affaire George Floyd : « Je vois qu’ils l’ont tué […] Ils ont beaucoup vérifié son pouls. […] Ils se rendent compte et ont continué à l’attacher. Tout son visage est sur l’oreiller. Et un gars est au-dessus de lui. De l’imaginer […] je suffoque« .

Le secrétaire général de l’ONG Andalucia Acoge, José Miguel Morales a certifié à Publico que « c’est une situation qui révèle que les choses ne se font pas comme elles le devraient en ce qui concerne les droits de l’homme […] les actions institutionnelles et judiciaires font preuve de peu de diligence. »
Plusieurs affaires similaires se sont produites et ont fini classées et oubliées, a-t-il souligné.

George Floyd ne pouvait pas respirer, Ilias Tahiri non plus. Les dégâts du racisme ne se réduisent pas à la couleur de peau, ils touchent les nationalités, les groupes ethniques et les religions.

Alors que plusieurs capitales mondiales ont manifesté contre les violences policières envers les afro-américains, alors que plusieurs chefs d’Etat se sont prononcés à ce sujet, alors que des milliers de Marocains ont rejoint le mouvement en dénonçant haut et fort le racisme sur les réseaux sociaux, qu’en est-il d’Ilias Tahiri ? Qu’en est-il du principe de proximité lorsqu’un frère connaît une mort sinistre dans le silence total ? N’est-ce donc pas et une victime de racisme et une victime de tentative de camouflage ?

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