"Deal du siècle" de Trump: Pourquoi pose-t-il problème?

"Deal du siècle" de Trump: Pourquoi pose-t-il problème?
lundi 3 février 2020 - 12:41

Après sa révélation mardi, le « deal du siècle » du président américain Donald Trump continue de susciter des remous de par le monde. Critiqué, ce plan « mort-né » a été refusé par la partie palestinienne. Cependant, les Israéliens n’attendront pas pour le mettre en œuvre, du moins la partie qui les intéresse, à savoir l’annexion des territoires palestiniens. Pour revenir sur ce sujet, le politique Tajeddine El Husseini apporte au micro de Hespress FR, son analyse de la situation.

Après un travail de plus de deux ans, le chef de l’Etat américain a présenté « sa » solution pour mettre fin au conflit israélo-palestinien qu’aucune des précédentes administrations n’a pu régler. Pour présenter son « deal du siècle » aussi appelé par les Palestiniens le « complot du siècle« , il a choisi celui qu’il appelle son « ami », le chef du gouvernement intérimaire israélien Benjamin Netanyahu.

Ouvertement pro-israélien, Donald Trump et son administration n’ont cessé de montrer des signes d’hostilité vis-à-vis des Palestiniens, notamment avec la reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu, la décision controversée au sein de la communauté internationale de ne plus considérer les colonies israéliennes en Cisjordanie comme « contraires au droit international », ou encore en fermant les bureaux de l’OLP, (l’organisation de libération de la Palestine) à Washington, tout en supprimant des aides financières vitales pour les réfugiés palestiniens octroyées à travers l’Unrwa, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens.

« Cela fait de nombreuses, nombreuses, nombreuses années, des décennies et des siècles, que l’on recherche la paix au Proche-Orient. Et ça, c’est une occasion d’y parvenir« , a déclaré le président américain aux côtés de son « ami » Bibi, estimant que ce plan concocté par son gendre Jared Kushner, a « une chance » de favoriser la paix. Les Palestiniens ont de leur côté refusé cet accord avant même son annonce. Ils n’ont pas été associés au processus, arguent-ils.

Un plan porté par la « décadence » du monde arabe

A ce titre, Tajeddine El Husseini, juge que ce plan n’a rien d’une solution équitable, ou réaliste, qui pourrait favoriser la paix entre les deux Etats. « Je crois que la proposition faite par Donald Trump et négociée avec Benjamin Netanyahu, n’est ni équitable ni réaliste. C’est un complot, une manœuvre qui est orchestrée par les Américains et les Israéliens pour un seul objectif, celui de spolier le restant du territoire palestinien », a-t-il martelé.

Et de rappeler la carte et les accords d’Oslo, qui n’ont octroyé aux Palestiniens « que 22% du vrai territoire palestinien ». « Aujourd’hui ce deal a comme objectif de ne laisser aux Palestiniens que 40% de ces territoires qui ont déjà été réduits à 22%. Ce qui veut dire que prochainement les colonies israéliennes vont absorber tout le territoire palestinien », a présagé notre interlocuteur qui va plus loin en déclarant que dans l’avenir, une nouvelle politique de transfert (qui était déjà connue dans cette région) sera opérée.

« Je pense que les Israéliens et les Américains ont profité d’une situation qui est claire aujourd’hui pour tout le monde », a avancé Tajeddine El Husseini. « C’est la décadence, le collapse du système arabe et même des pays arabes », a-t-il déploré en comparant le printemps arabe à « un automne ou un hiver« .

« Aujourd’hui, il y a au moins 5 ou 6 pays qui n’ont plus de pouvoir central qui n’ont plus de souveraineté et qui sont envahis par toutes les autres puissances », a-t-il dit en ce sens.

Un plan pour faire diversion 

Si Donald Trump et Benjamin Netanyahu ont affiché leur assurance lors de la conférence de presse annonçant le plan, la situation n’est pas aussi positive que veulent le montrer les deux hommes, notamment à cause du rejet catégorique des Palestiniens.

«Donald Trump et Benjamin Netanyahu ont essayé d’atteindre des objectifs par ce scénario. Le président américain, on sait qu’il est présenté devant le Sénat américain pour une procédure de destitution », en lien avec le « chantage » exercé sur le président ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il enquête sur son rival démocrate Joe Biden et son fils Hunter qui siégeait au conseil d’administration d’une compagnie de gaz en Ukraine. « Il (Donald Trump, ndlr) cherche à +noyer+ cette situation par cette initiative et aussi pour prendre du poids pour les prochaines élections » présidentielles prévues en 2020, a expliqué le politologue.

« Par rapport à Netanyahu c’est presque la même chose », avance l’universitaire. En effet, Bibi se trouve affaibli par des accusations de corruption dans trois affaires distinctes, et n’a pas réussi à dégager une majorité confortable pour diriger le pays après plusieurs élections législatives anticipées. Sa présence à Washington aux côtés de son rival centriste Benny Gantz, donne un aperçu de la situation difficile dans laquelle se trouve le Premier ministre sortant.

« Lui aussi est face à une procédure, pénale, qui risque de le mener en prison. Mais en plus, il cherche lui aussi à remporter les prochaines élections prévues en mars », détaille l’expert en relations internationales.

Pour lui, les deux hommes ont manœuvré et orchestré « ce complot » pour se sortir de leur situation délicate, et détourner l’attention. Cette proposition ne va pas dans la direction des « intérêts des Palestiniens et du monde arabe et islamique », fait-il valoir.

Un plan contraire au droit international

« Avec ce plan, on est en train d’écrire ce qui a déjà été fait. On met tout le monde devant le fait accompli, en l’assimilant à une sorte de légalité internationale », lance l’universitaire, pour qui l’équation se résume à « fabriquer de toutes pièces une légalité internationale pour justifier des choses qui sont illégales ».

« Si on prend en considération cette initiative, on va constater qu’elle est contraire à 100% au droit international. Le droit international est composé d’abord des accords internationaux signés par des Etats souverains et deuxièmement des résolutions et décisions des instances internationales. Et tous ces éléments de droit international sont bafoués par Trump, pas seulement par son deal mais bien avant, quand il a reconnu Jérusalem comme capitale unifiée d’Israël et installé son ambassade dans cette ville, quand il a reconnu l’annexion du Golan syrien comme partie intégrante d’Israël, c’est déjà une violation flagrante du droit international », fait-il remarquer.

S’inquiétant de la situation dans les jours, voire les mois à venir, le politologue se montre pessimiste concernant l’idée d’un règlement à l’amiable de ce conflit. « Je pense qu’ils vont faire au président palestinien Mahmoud Abbas ce qu’ils ont fait à Yasser Arafat. L’éliminer par n’importe quel moyen pour trouver une personne qui va accepter ce deal. Ils ont devant eux 4 années pour pouvoir réaliser ce projet », a estimé l’analyste.

Et de faire noter que le droit international devrait rester la base dans le règlement d’un conflit. « Il y a une contradiction absolue entre la réalité et l’illégalité », a affirmé Tajeddine El Husseini.

« On peut accepter ce qui est réel mais on ne peut pas lui donner une couverture de légalité puisqu’il est contre les principes de coexistence pacifique et contre les principes de droit international », dit-il.

« Si chaque Etat faisait cela, on tomberait dans la loi de la jungle. Et chaque superpuissance aura la capacité d’annexer les territoires qu’elle veut, et le droit international serait complètement bafoué et marginalisé, et c’est ça ce que cherche Donald Trump à réaliser par cet accord », conclut le politologue.

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