La chaîne d’information qatarie, Al Jazeera, média incontournable dans le monde arabe il y a encore une décennie, agonise. D’aucuns craignent pour sa survie qui ne tient plus qu’à un fil. Et pour cause, celle qui jadis était un passage médiatique obligé, n’est hélas plus cette référence médiatique que tout le monde lui accordait. Al Jazeera est « out ». L’actualité mondiale et surtout de celle du Moyen Orient qui avaient fait sa renommée lui échappent.
Les événements derniers et plus particulièrement ceux ayant eu trait à l’Iran, l’Irak et les Etats-Unis n’ont pas eu les coups de zappe escomptés. On s’est plutôt tourné vers d’autres chaînes et plus particulièrement « Russia Today Arabic » qui a été en haut des couvertures événementielles de cette région du monde. Al Jazeera, la chaîne de télévision satellitaire qatarie qui faisait le bonheur des printemps arabes n’a plus sa crédibilité d’antan.
D’aucuns accordent cette situation au blocus économique. Al Jazeera est une des treize conditions sine qua non nécessaire à la levée des sanctions. Mais il n’y a pas que cela qui explique la descente aux enfers de la chaîne qui revendiquait encore en 2013 jusqu’à 25,23 millions de spectateurs dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Il faut également voir la déchéance dans l’échec commercial de l’antenne américaine, dans les réductions d’effectifs menées en 2016, ou encore à la grève inédite du bureau de Londres en 2018, pour des revendications salariales.
Si l’on y ajoute la ligne éditoriale d’un groupe qui n’est plus hégémonique dans le paysage des médias panarabes et qui nourrit en outre une forme de ressentiment dans les couches sociales les moins aisées on comprend que Al Jazeera veuille se consacrer au numérique. Faut-il voir dans la création de « Aj+ » un support proposant du « native content » pour faire face aux critiques et à la concurrence, et surtout attirer les jeunes générations, de l’énergie du désespoir.
Son lancement en tout cas est pour l’heure un succès mais d’aucuns, dans les sujets des courtes vidéos diffusées (urgence climatique, islamophobie, décolonisation, féminisme musulman, droits de l’homme…) ne voient qu’hypocrisie et chant de cygne. Autant de droits à défendre alors que Qatar pays du travail forcé, l’esclavage moderne ne fait pas débat. Pourtant le directeur général d’Al Jazeera Media Network, l’Algérien Mostefa Souag, n’en démord pas : « Nous sommes allés au-devant des défis posés par les nouveaux médias », a-t-il affirmé. Qui vivra verra !
Le célèbre réseau qatari Al-Jazeera, qui émet en arabe, en anglais, en turc et en serbo-croate et qui a déchaîné les passions dans le monde arabe lors de son lancement dans les années 1990, a de sa ligne éditoriale, altéré défavorablement son influence qui naguère fut son prestige. Aujourd’hui il est discrédité, voire même détesté dans une large partie du monde arabe et d’un Moyen-Orient en pleine tourmente.