Hôpital Sidi Hsain d'Ouarzazate: C'est les patients qui font maintenant les frais des bras de fer entre corps

Hôpital Sidi Hsain d'Ouarzazate: C'est les patients qui font maintenant les frais des bras de fer entre corps
vendredi 31 janvier 2020 - 13:45

La situation au sein de nos hôpitaux publics est devenue alarmante. Manque d’équipements, infrastructure archaïque, pénurie de médicaments, pénurie de médecins et la liste est longue. Plus grave encore, on assiste désormais à des « non assistances » de patients pour, entre autres, des raisons syndicales et des règlements de comptes avec la direction de l’hôpital en question ou la tutelle suite à la non-satisfaction des dossiers revendicatifs.

Un cas flagrant a été remonté à Hespress Fr. La scène s’est déroulée à l’hôpital Sidi Hsaine Ben Nacer d’Ouarzazate, quand un enfant s’est présenté vers 18h30, courant semaine dernière, avec une fracture au niveau de sa main qui nécessiter une intervention chirurgicale.

Selon docteur Abbad Amine, réanimateur au sein du même hôpital, « le chirurgien qui devait opérer l’enfant a appelé l’équipe de garde, composée d’un infirmier, d’un panseur et d’un aide-soignant, pour prendre en charge le patient et le préparer pour la chirurgie. Mais l’équipe a préféré s’éclipser au bloc et naviguer sur le téléphone, laissant ainsi l’enfant dans le couloir ».

« Ce qui se passe normalement dans ce genre de cas, c’est que l’équipe de bloc prend en charge l’enfant, le fait entrer au bloc, le couvre, effectue les préparatifs techniques et prépare le matériel et équipements nécessaires avant d’appeler le chirurgien. Mais cette fois-ci, rien n’a été fait. L’équipe de garde a laissé traîner et l’enfant est resté  à attendre dans le couloir» explique Dr. Abbad.

Face à cette situation, poursuit notre interlocuteur, « le chirurgien a appelé une première fois le surveillant, puis une deuxième fois, et à la troisième fois il a appelé le directeur de l’hôpital qui lui a promis de régler le problème. Mais rien n’a bougé, c’est là où le chirurgien s’est dirigé vers moi car je me trouvais en salle de réanimation juste à côté, pour demander conseil ».

Une heure après, toujours rien, fait savoir Dr. Abbad. Le chirurgien s’est dirigé à nouveau vers son confrère pour l’informer que la situation est toujours la même et que l’équipe de garde ne veut toujours pas faire son travail.

« Quand je suis parti voir l’équipe de garde, et je leur ai posé la question, pourquoi ils n’ont pas fait entrer l’enfant au bloc, ils m’ont dit qu’ils attendent le chirurgien. Je leur ai dit que le chirurgien est là depuis tout à l’heure et que son téléphone était même à la charge dans la même pièce qu’eux, soit le bloc. Ils m’ont répondu que non, ils veulent qu’il reste à côté d’eux. Puis ils sont entrés en altération avec le chirurgien lançant à son encontre plusieurs accusations », nous fait savoir Dr. Abbad.

Interrogé sur les raisons qui ont poussé l’équipe de garde à refuser d’assister l’enfant, notre interlocuteur nous fait savoir que le but était de « saboter le médecin ». « Les infirmiers, contrairement au médecin, font des gardes de 12h et se reposent 36 heures. Leur travail est étalé sur des heures, et ils gèrent uniquement leurs heures de travail. Contrairement aux médecins, qui gèrent les cas. On n’a pas d’horaire. Eux, ils terminent leurs heures de travail et s’en vont, alors que nous, si on reçoit un patient à 7h du matin, alors que notre garde est terminée, on est obligé de rester tant qu’il y a des cas à traiter », relève notre interlocuteur.

Finalement, poursuit Dr. Abbad, l’enfant a pu être opéré, alors que s’il avait tardé un petit peu plus, il aurait perdre sa main.

Mais qui peut-on blâmer dans ce genre de situation ? Les infirmiers, la direction de l’hôpital, où le système en entier ?

Selon Dr Abbad, il y a plusieurs facteurs. Dans un premier temps, il nous indique que l’équipe de garde qui s’occupe du bloc est tenue de prendre en charge l’enfant, le réchauffer, le préparer pour l’intervention et préparer le bloc également. « Le chirurgien en question avait tiré la sonnette d’alarme à plusieurs reprises, en appelant le surveillant, qui est pendant la garde de nuit le représentant de la direction. Et il a appelé même le directeur de l’hôpital, donc il a suivi la procédure », souligne-t-il.

Mais notre interlocuteur nous fait savoir en parallèle que « l’administration est très faible dans ce genre de situation, et prend les choses à la légère en disant que ça allait se résoudre au final, ce qui est faux, puisqu’il s’agit-là d’un problème récurrent. Ce n’est pas nouveau ».

Comment ? « Imaginez on a une urgence, et un membre de l’équipe de garde vous dit : je vais aller dîner, l’autre vous dit je dois aller faire ma prière et une autre rentre aux toilettes et ne ressort plus. Que doit-on faire ? », se demande-t-il.

Hespress Fr a déjà évoqué, à plusieurs reprises, la colère des infirmiers et techniciens de santé publique contre leur tutelle vu la non-réalisation de leur dossier revendicatif, ce qui explique entre autres leur comportement. Toutefois, il ne s’agit pas là d’une usine, ou d’une industrie, mais d’un secteur vital et de la vie des citoyens.

Confirmant ce ras-le-bol, Dr Abbad souligne tout de même que cela « a un impact énorme » sur leur activité, notant ainsi qu’il y a pénurie de médecins dans les hôpitaux publics.

« À l’Hôpital d’Ouarzazate, il y a 2 réanimateurs, qui assurent une garde 24h/24h 7j/7 tout au long de l’année, sans aucune relève et c’est le cas depuis 4 ans. Pour les anesthésistes, on en a 27 à l’hôpital. Même chose pour les médecins de chirurgie digestive et générale, il y en a deux » nous détaille-t-il.

Selon lui, il s’agit-là d’un « laisser-aller de la part de l’administration qui est dépassée par les événements », donnant ainsi un exemple récent. « Il y a deux ou trois jours, on a eu 4 ou 5 urgences d’un seul coup. Alors qu’on a un seul bloc. Et l’équipe ne voulait pas travailler. On n’a pas cessé d’appeler le directeur pour nous régler cette situation ou nous changer l’équipe, mais rien n’a été fait, et aucune sanctions n’a été décidée», raconte-t-il.

« On avait à une époque une épidémie de certificat parce qu’on n’avait pas d’équipe depuis près de 6 ou 7 mois. Même dans les urgences, au bout d’un moment, il n’y avait plus d’équipe pour assurer la garde. Il n’y avait même pas de contre-visite », ajoute-il, soulignant que ce manque au niveau des équipes de garde est causé par le syndicat des infirmiers qui a gagné en puissance, et la direction qui n’arrive plus à le gérer ».

« Au Maroc, le syndicat a un point fort. C’est-à-dire que soit tu réponds aux revendications, soit ils arrêtent le travail, mais là il s’agit de la vie des gens. Dernièrement, l’activité du bloc a été arrêtée pendant 5 ou 6 jours, parce qu’un groupe d’infirmiers a décidé de suspendre le travail, subitement, sans communiqué, sans annoncer de grève ni rien», poursuit-il.

Face à cette situation, les assistantes ont contacté les malades qui avaient rendez-vous, nous dit notre interlocuteur, pour reporter à nouveau leur RDV à des mois parce que le bloc était en aux arrêts, et ce sans aucune réaction de la part de la direction.

« Quand on remonte cela à la direction, ont nous dit que le problème est réglé, mais 3 ou 4 jours plus tard, le même schéma se reproduit. Des patients qui rentrent carrément jusqu’au bloc, on les prépare et on revient après pour leur dire qu’il n’y aura pas de chirurgie, et qu’on allait les rappeler plus tard», déplore Dr. Abbad.

Notre interlocuteur souligne ainsi que cette situation n’est pas propre à l’hôpital de Sidi Hsain d’Ouarzazate, mais un phénomène qui se produit dans l’ensemble des hôpitaux du Royaume, notant que c’est l’une des raisons qui poussent les médecins à la démission ou à l’abandon de poste carrément.

« Les problèmes que nous rencontrons à l’intérieur des hôpitaux et les contraintes du bloc, il n’y a que le médecin qui les connait. Et le patient n’en sait rien, il ne connait que le médecin. Des fois le médecin est présent sur place, mais on dit au patient qu’il n’est pas là, ou qu’il est au bloc pour une chirurgie qui va durer 6 ou 7 heures », indique-t-il.

Plusieurs cas de figure qui ont été remontés à la direction de l’hôpital, au délégué du ministère, à la tutelle et même aux parlementaires, sans qu’il n’y ait aucune intervention pour remédier à cela, souligne Dr. Amine Abbad.

« On est arrivé à plus de 20 écrits qui sont même arrivés sur le bureau du ministre. On a écrit au directeur de l’hôpital, au directeur régional, au délégué, aux parlementaires, au Wali. Le ministre est même venu à l’hôpital et a visité les urgences qui étaient dans un état catastrophique. Il a tout vu et a reconnu la gravité de la situation et la légitimité de nos revendications. Il a demandé aux responsables de régler la situation dans un délai de deux mois. Mais les choses sont restées inchangées », conclut notre Dr. Abbad.

Il est donc légitime et tout à fait opportun à ce stade de s’interroger sur le rôle des délégués du ministère, des parlementaires (élus par le peuple) et du ministère de la Santé en particulier, dont la mission première est de gérer ces anomalies, qui ne cessent de prendre de l’ampleur, et se répercutent sur les patients qui sont de plus en plus ignorés et non pris en charge, ce qui les pousse à se diriger vers le privée en dépit ed l’absence des moyens financiers. Et là c’est une paire de manches!

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