Le Tribunal administratif ayant rejeté la demande de report du deuxième tour de la présidentielle, déposée par les avocats de Nabil Karoui, ce dernier n’avait donc plus, pour espérer l’investiture présidentielle que l’unique et ultime débat télévisé, programmé vendredi à 22 heures (locale) entre lui et son adversaire électoral Kais Saïed.
Ce tête à tête au-devant du peuple tunisien, juste avant le silence total d’une bien singulières campagne samedi, était le premier du genre démocratiquement en Tunisie. Paradoxalement le vote des Tunisiens à l’étranger pour le second tour de l’élection présidentielle anticipée avait déjà commencé.
Pour les deux candidats à la présidence ou au second tour, il fallait donc assurer « l’en route vers Carthage » en cette soirée de vendredi lors de ce débat télévisé sur la première chaîne nationale « Wataniya 1″. C’était de l’inédit en Tunisie. Le tirage au sort ayant permis à Kaïs Saïed de se présenter en premier, il le fit de manière académique et en arabe classique et châtié. L’homme sembla d’entrée prendre l’ascendant sur un Nabil Karoui trop brouillon. Le candidat populiste qui s’exprimait en dialecte était vraisemblablement intimidé par la personnalité de l’universitaire indépendant, très à l’aise à ce jeu de question réponse, de son discours saccadé et sans faille.
Au contraire, Nabil Karoui, le leader de « Qalb Tounès » tout juste libéré de prison mercredi, bafouillait et cherchait ses mots. Bref, sur la forme on aurait dit l’élève et le maître. On a eu l’impression tout au long du débat, qu’au charisme et au background de l’un, Kaïs Saïed répondait une ambition de « moi président » de l’autre un peu à l’image d’un François Hollande maladroit.
D’un autre côté et sur le fond Kaïs Saïed a dominé son sujet se disant s’être inspiré des préoccupations des citoyens ainsi que des suggestions des jeunes pour constituer son programme de gouvernance. Il a maîtrisé les sujets d’actualité, la sécurité de la Tunisie, la diplomatie, l’économie et autres suggérés par un couple d’animateurs à la hauteur de l’événement. Il a surtout et avec classe, réussi à faire face à l’agressivité du désespoir si l’on peut dire de son adversaire populiste qui quoique par à-coups grappillait quelques points de par un côté moderniste en opposition au côté conservateur de l’autre.
Mais, tout au long de ce débat, Nabil n’aura jamais eu le dessus sur le candidat indépendant qui est resté droit dans ses bottes même quand il fut traité de salafiste, qu’il renia du reste. A l’opposé Nabil Karoui n’a jamais su faire la différence sans doute timoré par la personnalité de Robocop.
In fine, le face-à-face télévisé passionné et passionnel qui aura duré plus d’une heure et demi entre l’universitaire Kais Saied, 61 ans, et l’homme d’affaires et des médias Nabil Karoui, 56 ans, a clos la campagne rocambolesque de la présidentielle. Il est comme un sentiment qui flotte, c’est qu’il aura peut-être tourné court pour le second et dévoilé le futur proche de la Tunisie.
La campagne électorale pour le second tour de la présidentielle a démarré le 3 octobre courant. Samedi est décrété jour de silence électoral avant l’appel aux urnes dimanche pour une troisième fois en moins d’un mois.
